jeudi 27 juin 2013

quelques infos flash

La semaine prochaine, je terminerai mon récit sur Benares. Promis. Si vous êtes déjà en vacances, soyez attentifs à vos mails ou visitez mon blog: mario gotto.blogspot.com/
Nous avons fait les travaux liés à l'acoustique. Nous avons placé des panneaux dans les deux salles. Il reste un mur à construire, mais la différence se fait déjà entendre si je puis dire.
Nous aurons du foie de veau tout frais et des couteaux de mer cueillis ce matin en Bretagne. A l'heure qu'il est, ils sont déjà en route pour Rungis. Mon poissonnier lui démarre vers 21 heures, il est à Rungis (le plus grand marché de frais d'"Europe) vers minuit ou un peu plus. En même temps que les Bretons qui montent avec les couteaux, homards etc....Mais il ne peut pas repartir de suite car il attend les camionnettes frigos qui arrivent de Marseille avec les sardines. Evidemment, Marseille c'est plus loin que la Bretagne et en Belgique, on apprécie plus les petites sardines de la méditerranée que les grosses de l'Atlantique. Son obsession à mon poissonnier c'est de passer Paris au retour avant les premiers bouchons. Bon nous tout ça, on s'en moque un peu, mais c'est pas mauvais de connaître toutes ces péripéties.
Le veau lui, ne vient pas de Paris mais de Malmedy. Le problème c'est que le foie de veau bio est rare et donc je dois me battre avec mon boucher pour en avoir. "Oui, mais tout ce que je te donne, je ne sais pas le vendre à mes clients", me dit-il. Je lui explique alors que mes clients sont plus important que les siens puisqu'ils sont multiplicateurs. " Ouah! j'ai mangé un de ces foies de veau à Como en casa". 
Bon vous, mes clients amis, vous savez tout cela mais eux...
Nous avons vraiment très bien travaillé en juin. Magnifique! J'imagine qu'on va un peu soufflé en juillet. Allei, venez nous dire au revoir avant de partir. Nous on ferme et on part du 28 juillet au 15 août. On réouvre le 16 août.
Oui, Paquita elle, notre associée part ce 30 juin, au Portugal. Avec son nouvel amoureux. Ils vont vivre au milieu des bois. Juste d'amour et d'eau fraîche. Vous pôuvez lui rendre visite, elle fait chambre et tentes d'hôte. Elle reviendra de temps en temps mais on ne sait pas s'il elle reviendra un jour définitivement.
Allei, la semaine prochaine, la suite et fin de Benares. Mais je vous le dis déjà, je n''aurai jamais du accepter cette invitation d' Eterno....

mardi 18 juin 2013

nocturnes à Benares (3)

Cela ne dura pas plus d’une poignée de secondes.  Nous marchions dans la rue principale de Benares et tout à coup, comme une fulgurance, je me sentis bien dans la foule, en communion, en harmonie avec elle, avec cette impression de légèreté, de lévitation. L’impression de prendre de la hauteur et de me voir moi-même au milieu de cette multitude, compacte, en marche, ce mélange de piétons, de cyclistes, de rijkchaw, de motos, de vélo-camions transportant bonbonnes de gaz, ballots sur 3 mètres de hauteur. Foule  de femmes, d’enfants et de vieillards, de jeunes hommes courants à leur travail, longeant des boutiques, des échoppes, de petits ateliers de confections, de fabrications de naans ou de chapatis. Je me sentais léger et là où je devais être. Avez-vous jamais vécu ce sentiment de communion et d’harmonie, un bien être qui vous donne une puissance créatrice, avec laquelle vous avez l’impression de pouvoir tout vaincre, créer, changer le monde et en faire quelque chose de mieux ? Ces moments où dans votre esprit des projets naissent et vous paraissent réalisables et où les obstacles deviennent des tremplins ? Mais cela ne dura qu'une poignée de secondes, très vite le bruit, les klaxons des motos et des tchouks tchouks qui nous talonnaient, la puanteur persistante eurent raison de cet instant de béatitude. Par-dessus tout, ces motos qui klaxonnaient au milieu d’une foule de piétons étaient d’une violence insupportable. Nassim et moi avions pris l’habitude de ne pas bouger de notre trajectoire et d’empêcher ainsi les motos de passer. Quand les coups de klaxons se faisaient exagérément agressifs, nous nous retournions et fixions le motocyclistes avec un regard noir, l’un de nous deux restant face à l’engin, l’autre le contournant pour aller au plus près du chauffeur qui, paniqué, perdaient tout de leur superbe et joignaient les mains pour implorer notre pardon.
J’avais rêvé de cet instant de grâce que je vécus par deux fois, celle fois-là à Bénares et la fois suivante à Bombay, dans la gare à regarder débarquer par centaines les repas individuels en provenance des familles des milliers d’ouvriers dispersés dans cette ville de trente millions d’habitants. Mais ça je vous raconterai une autre fois.
Je râlais encore sur ma sortie nocturne avec Eterno à regarder les bûchers de Benares mais je repensais aussi à tout ce qu’il m’avait appris sur l’Inde, ses clivages, ses divisions, ses castes, ses conflits identitaires.
« Le problème essentiel de l’Inde. Mario, ce sont ses castes et ses croyances avait-il commencé à m'expliquer. Ses castes qui figent les inégalités. Sais-tu qu’une seule caste contrôle 85% du commerce. C’est vrai ici mais c’est vrai aussi pour les petits commerces indiens en Belgique et partout dans le monde.  Ceux qui, appartenant à d’autres castes inférieures tentent de commercer, le font au péril de leur vie et ne peuvent espérer aucun soutien financier pour démarrer. D’autres castes, dont celle à laquelle appartient Mitall se définissent comme élue, pouvant s’enrichir au mépris de tous les autres qu’ils ont pour devoir de soumettre. Certaines castes ont accès à l’anglais et d’autres pas. Or la seule langue nationale de l’Inde est l’Anglais. C’est la langue de l’administration, c’est la langue des affaires et si tu ne possèdes pas l’Anglais, tes chances de réussite sociale sont nulles.
L’autre difficulté essentielle de l’Inde est la corruption et efficience des pouvoirs publics. La croissance indienne a pris un coup d’arrêt à cause des insuffisances des infrastructures : routes en mauvais état, coupure d’électricité, corruption des administrations.
De plus, les riches ont désertés l’état. Sais-tu que devant la saturation des villes, des riches ont construits leur propre ville ? Ils s’arrangent pour ne pas payer d’impôt et placer leur argent à l’étranger. Ils ont construit des villes privées avec des appartements de 500 à 3000m2, leur terrain de golf, leur piscine… Et ces villes deviennent des catastrophes écologiques. Car il y a une chose à laquelle ils n’ont pas réfléchi, c’est que pour vivre ces villes avaient besoin de personnels, de personnel d’entretien, de chauffeurs, de cuisiniers, de personnels de nettoyages, de jardiniers, d’éboueurs et que sais-je encore. Et bien tout ce petit personnel s’est installé en bordure de ces villes privées, a construit des bidonvilles, a pompé l’eau des nappes phréatiques, a pollué ces nappes avec ses déchets et les riches se sont retrouvés dans la même situation qu’à Bombay ou New Delhi.
Comprendront-ils que sans un minimum de partage des richesses, rien ne sera possible pour qui que ce soit, qu’il soit pauvre ou riche. »
Je repensais à tout cela en marchant et au rendez-vous que j’avais encore accepté avec Eterno le soir même à minuit. Tu vas voir une vie underground comme tu ne peux l’imaginer Mario, m’avait dit Eterno. J’aurais dû refuser. Mes problèmes intestinaux devenaient insupportables, j’étais obsédé par la présence de toilettes utilisables. Nous ne pouvions jamais nous éloigner de l’hôtel ou de restaurant plus ou moins potables. Je me bourrais de paracétamol pour me débarrasser de la fièvre qui me pourrissait la vie. Pour le dire platement l’Inde me faisait c….. J’avais milité assez toute ma vie. Je voulais un voyage pour le plaisir et non pas pour redécouvrir que le monde restait injuste et que moi je n’avais toujours pas appris à y être indifférent.
(Le journal Le Monde publie régulièrement des articles sur l'Inde dont les propos d'Eterno sont largement inspirés)
 Pour vous écrire, je suis installé à la table numéro trois de Como en casa où viens de se terminer le service de midi. Il fait  une chaleur écrasante à l’extérieur, ce qui fait que les clients (je n’aime pas ce mot, je préfère le mot ami-client) ont préféré manger à l’intérieur où il fait frais. Nous leur avons servi des « paneis de baccalhau » ces beignets portugais de poisson, avec une salade style grecque arrosé d' un vinaigre de cidre asturien et d'huile d'olive. Quoi de plus métissé-méditerranéen que cela.
En parlant de baccala, savez-vous qu’il y a en Europe trois restaurants qui servent du baccala panné à la farine de riz ? L’un se trouve près de la puerta del sol à Madrid et occupe le local où a été fondé le PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol)à la fin du 19ième . On y sert une seul tapa : le baccala panné. L’autre se trouve sur la piazza Sonino dans le trastevere à Rome. Le restaurant se nomme I marni, les marbres en français vu que le dessus des tables sont en marbres. En plus du baccala, on y sert aussi la meilleure pizza d'Italie, donc du monde (ne riez pas, tous ceux qui y ont été sur mes recommandations sont d'accord: c'est la meilleure pizza du monde). Le troisième restaurant se trouve à Liège au coin de la  rue de la Poule et de la rue Hors Château. Le restaurant est caché dans une ruelle, seuls quelques privilégiés y ont accès, Il se nomme Como en Casa et son baccala est tendre et moelleux et divin, comme à Rome ou à Madrid.
Allei, à très vite
Mario

jeudi 6 juin 2013

Nocturnes à Benares (2)

Le propriétaire de l'hôtel où nous logions avait acquit et restaurer un bâtiment à à peine 100 mètres de son bâtiment central. C'est dans ce nouveau bâtiment que nous fûmes loger. Marlène et moi avions la chambre la plus spacieuse,, Paquita et Begonia celle d'à côté et Nazim celle d'en face. Nous devions donc quitter ce bâtiment et passer trois ou quatre ruelles sombres mais peu fréquentées pour nous rendre au bâtiment central pour le bar ou le petit déjeuner. Les ruelles étaient sombres et crasseuse, nous devinions des logements sales et sans éclairages, d'où sortaient des groupes d'enfants et où vivaient des familles. Nous comprîmes assez vite que malgré cela, ces familles étaient privilégiées par rapport à d'autres sans logement aucun. Nous le comprîmes dés le lendemain matin en voyant au lever, les enfants courir et jouer sur les toits avec leur cerf volant, les filles se peignant et faisant leur toilette, les femmes faisant la causette d'un toit à l'autre. Il y avait à cet hauteur, je crois que nous étions à un troisième ou quatrième étage, quelque chose de doux, de familial et serein qui contrastait totalement avec le bruit et la violence de la foule des ruelles d'en bas.
C'est dés le premier soir, alors que nous nous rendions à un restaurant de la rue centrale que je croisais de nouveau Eterno. Ainsi je n'avais pas rêvé, C'était bien lui que j'avais vu lors de cette marche forcée vers l'hôtel. Notre contact ne dura que quelques secondes, le temps de me remettre de ma surprise t le temps pour lui de me proposer de le rejoindre à minuit, au même endroit, là où nous débouchions sur la rue principale au sortir du dédale de ruelles où se trouvait notre hôtel..
J'étais plein d'illusions en entrant dans le resto recommandé par différents guides touristiques. Il y avait un monde fou, nous commandâmes thalie et naan. Heureusement il y avait les naan et le riz car les raviers composant le Thalie était désespérément emplis de bouillon style bouillasse et il fallait chercher pour y trouver les légumes et les lentilles annoncées. Malgré tout, je me remettais malgré mes problèmes intestinaux et je ne sais pourquoi, la présence d'Eterno dans les environs me mettait de bonne humeur. Je pensais qu'Eterno me ferait découvrir une Inde underground pleines de surprises, de bonnes surprises.
En fait, j'aurais du envoyer Eterno promené, je n'aurais jamais du quitter ma chambre et aller à ce rendez-vous.
Eterno m'emmena le long du Gange que nous nous dirigeâmes vers l'amont. Je fus directement pris à la gorge par les odeurs pestilentielles de pisse, de merde et de pourriture. J'avais, heureusement pris mon foulard que je posai devant ma bouche et mon nez pour me protéger. Mais peu à peu vint s'ajouter une odeur de fumée, des particules de cendres virevoltaient dans l'air, la fumée se faisaient plus denses et peu à peu, je distinguais dans le noir, des montagnes de bois débité en bûches, des hommes pareils à des charbonniers y travaillant, et enfin je vis les bûchers, les flammes de trois ou quatre énormes foyers en plein air en contrebas, au bord du fleuve. Des groupes silencieux regardaient ces flammes semblant s'y recueillir. Je ne savais pas encore pourquoi mais l'ambiance était pesante, silencieuse et empreinte de tristesse et de recueillement. " Voilà, me dit Eterno, je suis désolé de commencer par te montrer cela, mais tu es ici dans ce qui est sans doute, surtout en cette période de fête religieuse, un des plus important centre d'incinération en plein air, au monde. L'objectif de tout indien est d'être incinéré ici, à Benares, au bord du Gange dans lequel ses cendres devront être dispersés. Il n'est pas rare que les vieilles personnes qui savent qu'elles vont bientôt mourir, supplient leur famille de les amener ici, de les incinérer ici. Et pour les familles c'est le meilleur hommage qu'ils puissent rendre à leur mort. Certains dépensent tout ce qu'ils ont pour incinérer leur mort ici. D'autres qui n'ont pas les moyens de se payer un bûcher, emballent les corps dans les plus beaux tissus qu'ils possèdent, construisent des radeaux de fortunes, y déposent le cadavre recouvert de fleur et le font glisser sur le Gange."
J'étais sans voix, j'étouffais sous la fumée, j'avais les yeux qui piquaient, je priai Eterno pour que nous nous éloignions, ce que nous fîmes en reprenant le chemin en sens inverse. Dire que j'avais cru qu'il s'agissait de barbecue!!!. Eterno m'expliqua qu'on brûlait chaque jour de 600 à 700 cadavres. Que c'était une tradition contre laquelle il était impossible de lutter et que cela posait des problèmes tant sanitaire qu'écologiques énormes. Certaines castes refusent de brûler leur cadavre car leur tradition religieuse exige de laisser leur cadavre à l'air libre, en hauteur sur des pilotis et ces cadavres pourrissent et sont dévorés peu à peu par des charognards. Le malheur est que l'on construit de plus en plus en hauteur et que les odeurs gagnent les appartements et habitations. D'autant plus qu'une épidémie a ravagé la population de vautours et autres charognes. Le gouvernement a fait différentes propositions pour résoudre ce problème, mais aucun compromis n'a encore pu être trouvés. 
"Je croyais en te voyant Eterno que tu me ferais découvrir les beautés de l'Inde, on m'en a tellement vantés les charmes, on m'a tellement parlé de la sagesse indienne, du bonheur de ces peuples et jusqu'à présent je n'ai vu que misère, crasse et puanteur."!! 
Etreno me laissa à l'entrée de l'hôtel, je regagnai ma chambre prudemment sans éveiller Marlène. J'aurais voulu me doucher, me rioncer les narines pour me débarrasser de la crasse que j'avais l'impression d'y avoir accumuler..Vraiment qu'est-ce que j'en avais à foutre de ces histoires macabres, de cette misère à laquelle semblait se résigner tout un peuple qui serait bientôt le plus important de la p^lanète.
La suite à la semaine prochaines.

Tout ce que je raconte sur l'Inde est véridique, y compris le traitement des cadavres qui est vraiment un problème de société. Nous avons circules parmi les bûchers de Benares et cela n'a rien de réjouissant et j'aurai préféré m'en passer.

Vous avez été nombreux à apprécier notre nouveau restaurant, celui qu'Anne Sophie nous a aménagé. Elle a changé jusque notre éclairage, y a mis des salons, des meubles, comme à la maison. Ophélie disait que c'tait gai d'y entrer, de prendre son apéro dans un coin et de terminer la soirée dans un petit salon. Il est encore plus convivial et cela nous donne beaucoup de perspectives pour l'avenir. Pourquoi pas un nouveau resto et une nouvelle déco tous les deux mois?
Bon couteaux de mer, jamon de pato et soit cabillaud (la semaine dernière c'était du maquereau), soit foie de veau à la carte.
Je crois bien que c'est la terrasse dans la rue de la Poule qui servira de décor ce WE.
A très vite
Mario