lundi 19 juin 2017

Street art à Roubaix et variations sur Modiano

Nous n’avions pas planifié ce court voyage. En fait si. Nous nous étions dit le WE dernier quand Marlène m’avait montré l’article du soir sur « Street génération(s) », une expo sur l’art urbain à Roubaix, que nous ne pouvions pas manquer cela. Mais nous n’en avions plus reparlé. Le mercredi soir, elle m’a demandé si j’allais marcher demain jeudi, j’ai répondu : ah, non, on annonce de la pluie, donc nous allons voir l’expo Street art à Roubaix. Ah, chouette m’a-t-elle répondu, alors je prends une petite valise et nous passons une soirée et une nuit soit à Roubaix si cela se prête, soit à Lille. Et oui, liberté : privilège de la pension.
Roubaix et Lille, c’est tout près en fait. Nous sommes partis à 11h et à 13heures pile, nous étions attablés dans le magnifique restaurant de « La condition publique ». Gigantesque bâtiment industriel, ancienne usine de conditionnement textile, aujourd’hui reconverti en lieu d’animations culturelles: laboratoire créatif, lieu de vie, concerts, expositions, fab lab, marché, restaurant, événement. Rien que l’aménagement du restaurant et le bâtiment valent le déplacement. La toiture est en partie végétalisée et s’y développe un potager urbain où s’affairent, comme au resto, des jeunes en formation.
L’expo est tout simplement extraordinaire. Le lieu est fait pour bien sûr. Il y a des photos faites dans les rues et dans le métro de New York, il y a des toiles et des panneaux. Il y a surtout des œuvres des plus grands artistes réalisées in situ. Cerises, oui avec s, sur le gâteau, des oeuvres ont été réalisées sur les murs extérieurs  et en les parcourant, on se retrouve dans une cité ouvrière dont les rues convergent en étoiles vers l’usine. Exactement comme le carré de Bois du Luc ou la cité du Grand Hornu. Sur le toit de la Condition Publique, on peut admirer une immense composition aussi merveilleuse que touchante de Jef Aérosol.’On resterait des heures à la regarder.
L’expo retrace l’histoire de l’art urbain depuis le New York des années quatre-vingt, en passant par les quais de Paris et les murs des grandes villes du monde. Le phénomène graffiti s’est développé à une rapidité inouïe pour se métamorphoser aujourd’hui dans les pochoirs des tout grands artistes que sont Banksy, Jef Aérosol (très présent à Roubaix), Space Invader etc.
C’est Magda Danisz qui a fait entrer l’art urbain dans les galeries et musées. Grâce à son travail, les œuvres de Jeff Aérosols ou d’autres se payent en dizaine de milliers d’Euros. Les œuvres de Banksy atteignent aujourd’hui le million d’Euros. C’est elle la commissaire de l’expo de la Condition Publique.
Notre génération a eu de nouveau la chance d’assister à la naissance et à l’épanouissement d’une nouvelle école ou d’un nouveau mouvement artistique qui a accompagné la culture urbaine. L’art urbain a atteint aujourd’hui déjà, ses lettres de noblesses.
Ne ratez pas cette expo et cette petite excursion dans le nord de la France. On découvre ainsi un Roubaix qui en plus de la Piscine (ancienne piscine transformée en musée d’art contemporain) s’enrichit d’un nouveau lieu, très inspiré du Lieu Unique de Nantes mais qui s’est donné une finalité beaucoup plus large et ouverte au public et aux jeunes.
L’expo est prolongée jusqu’au 9 juillet. Je vous souhaite vraiment de pouvoir y aller.
Nous adorons Lille et c’est là que nous avons passé la soirée et la nuit. Le vieux Lille est Hyper animé en soirée (or nous y étions un jeudi soir) : des dizaines de terrasses et restaurants bondés, une architecture ancienne magnifiquement préservée, l’endroit idéal pour un city trip. Dîner au bord de la pelouse dans l’hyper centre, dans une ambiance très conviviale. Petit déjeuner chez Méert près de la Grand Place : des prix très abordables dans un cadre éblouissant.
Retour à la maison.
J’ai sursauté en lisant cette phrase de Modiano (Patrick Modiano, prix Nobel de littérature 2014) dans « Un pedigree » : « Mon père a perdu le sien à l’âge de quatre ans ». Je l’ai lue et relue. J’ai imaginé Modiano tordre cette phrase dans tous les sens avant d’arriver à cet épure. J’ai divagué. Me suis dit  qu’il  avait  peut-être commencé par écrire : « mon père avait quatre ans quand il perdit son père ». Mais non, il n’aurait pas employé le passé simple puisque le moment où cela s’est passé est assez précis dirait ma sœur Evelyne, (romaniste, linguiste, préfète à l’athénée Catteau à Bruxelles). Mais il aurait pu écrire aussi : « mon père avait quatre ans quand le sien est mort ». Ou : « à l’âge de quatre ans, mon père a perdu le sien ». Tiens, pourquoi n’a-t-il pas retenu cette dernière forme ? Peut-être est-il parti d’une phrase bien plus compliquée du style : « à quatre ans, mon père se retrouve orphelin » ou «  à quatre ans, mon père se retrouve seul avec sa mère ». Ou encore : « ma grand-mère a été veuve quand mon père avait quatre ans ». Non plus, cette dernière tournure supposerait que le sujet du texte est la grand-mère et non plus le père. Il est possible que cette phrase ait été une fulgurance chez Modiano. Mais je préfère quand même l’imaginer la triturer en tous sens. Il se répète simplifier, simplifier. Sujet, verbe, compléments : « mon père a perdu le sien à l’âge de quatre ans ».
Je relis tout Modiano en ce moment, n’ai pas encore mis la main sur un de mes préférés : « Dans le café de la jeunesse perdue ».
Mais je laisse tomber la lecture de temps en temps car j’ai lancé ma première opération « pains et pâtes pour les voisins et voisines ». Résultat : génial. Cinq demandes, trois Kilos de tagliatelles et feuilles de lasagnes fabriquées ce dimanche matin. J’adore cette farine qui se transforme sous mes mains.
Tiens, vous êtes quelques-uns à partir dans les Abruzzes pour les vacances. Cela me touche et me fait plaisir. Je vous donnerai quelques tuyaux la semaine prochaine.

Allei, à lundi comme dab hein…

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